J’irai fleurir ta tombe camarade Aragon !

Ayant vécu une enfance plus ou moins de combat au Maroc , pays chéri , au mille et un contrastes de lumière , mais sous le règne d’un despote,Hassan 2 , dont l’évocation du nom seul ,  faisait terreur dans les villes et campagnes ,dans les lycées et usines .
mais dans nos lycées et universités on pratiquait de la résistance à l’oppression , malgré la police secrète toute puissante , malgré les Awax ,malgré les centres de détention secrets où on subissait les pires tortures , j’étais jeune communiste de 16 ans et j’ai vu des camarades à moi disparaître du jour au lendemain.

La poésie de Mahmoud Darwich , d’Abdellah Zriqa , d’Aragon et de Pablo Neruda nous faisait voyager ,nous faisait rêver…

mon arrivée en France , par je ne sais quel miracle , pour être lycéen puis étudiant , au pays de Robespierre de Danton , de Montesquieu , de Hugo et de mon idole Aragon , me faisait oublier l’amertume de l’exil ,  mais malgré l’adieu à la terre natale , j’éprouvais de  la joie d’avoir fait un voyage dans le temps et l’espace…j’ai d’autant plus aimé la France , ses intellectuels , sa philosophie des lumières , que j’ai fait connaissance avec des camarades français de gauche , humanistes aux grands cœurs.
avec le chef-d’oeuvre  « le fou d’Elsa » d’Aragon , j’ai découvert un Aragon grand amoureux de la mystique et de l’Andalousie musulmane , de ses saints , de ses poètes , ses philosophes et ses troubadours , j’ai découvert avec « Le fou d’Elsa » non seulement le communiste engagé qu’est Aragon, mais un grand poète mystique , l’un des plus grands poètes français dont la prose inégalée survole les cimes de la sensualité et de la beauté.
J’irai fleurir ta tombe camarade , merci d’être, merci d’avoir été , ta poésie joliment mise en musique par Ferrat et Léo Ferré ,était comme un baume au cœur du jeune exilé que j’étais.

Zine Bensrhir.

Caen , le 3 février 2023 .